ROSEMARY STANDLEY
AVRIL
MA GALERIE SONORE
MA GALERIE SONORE est un espace virtuel dédié à l’art radiophonique lancé la saison dernière. Entre septembre et juin, des personnalités, réalisateurs et réalisatrices, artistes et radios complices proposent une sélection coup de cœur de trois œuvres audio ou émissions à l’écoute sur mascenenationale.eu et radioma.eu.
ROSEMARY STANDLEY
AVRIL
MA GALERIE SONORE
MA GALERIE SONORE est un espace virtuel dédié à l’art radiophonique lancé la saison dernière. Entre septembre et juin, des personnalités, réalisateurs et réalisatrices, artistes et radios complices proposent une sélection coup de cœur de trois œuvres audio ou émissions à l’écoute sur mascenenationale.eu et radioma.eu.
Chanteuse, musicienne et actrice franco-américaine, Rosemary Standley est la voix des groupes Moriarty et Birds on the Wire. Elle mène plusieurs projets en parallèle, notamment pour la scène. Retrouvez-la dans Carmen. de François Gremaud.
LA
SÉLECTION
TATION
DE LA
SÉLECTION
Rosemary Standley s’est faite connaître au sein du groupe Moriarty dont elle est – entre autres - la chanteuse. Parallèlement, elle a participé à de nombreux projets musicaux, en particulier avec Dom La Nena sous le nom de Birds on a Wire. Elle incarnera la Carmen, de François Gremaud, ce mois-ci à MA scène nationale.
On pourrait être surpris par le premier de vos choix qui concerne un podcast autour des cheveux. Qu’est-ce qui vous intéresse dans cette approche ?
Tout d’abord, je suis toujours curieuse des trucs un peu bizarres. J'aime découvrir des choses que je ne connais pas et à propos desquelles je ne serais jamais allé fouiller sinon. Par ailleurs, il se trouve que je connais la journaliste qui le fabrique, Judith Sibony. Je ne l'ai écouté que récemment et j’ignore ce qu’il l’a amenée à ce sujet. C’est une passionnée de théâtre et c’est plutôt là-dessus qu’elle est habituellement.
Il se trouve qu’il y a très longtemps, dans un spectacle sur la musique baroque anglaise, et la musique américaine, Love I Obey, j’avais très envie d’évoquer des questions liées au féminin au travers d’histoires de cheveux. Une façon de raconter les étapes différentes de la vie d'une femme à travers la chevelure : les moments où on se les coupe, le moment où on se coiffe, le moment où on les détache, où on les rattache, etc. Finalement, c’est quelque chose que je n’ai absolument pas pu exprimer dans le spectacle. Alors quand j’ai entendu parler de ce podcast, ça m’y a refait penser, je suis allé écouter et j’ai adoré. Trois entretiens qui m'ont davantage marquée : celui de Christian Hecq, qui est comédien et qui est chauve. Celui avec Sophie Fontanel ancienne journaliste chez Elle et qui porte ses cheveux blancs. Et le dernier en date, celui qui raconte les cheveux crépus supposés indomptables. C’est souvent très marrant, très vivant, et sous couvert d'une interview un peu classique, dans le genre d’un magazine féminin, au final je trouve ça très profond. Ça traverse la mythologie, la psychanalyse, des angles de vue un peu inexplorés je trouve. En tous cas que moi, je ne connaissais pas.
Et puis on y évoque toutes ces injonctions faites aux femmes, aux filles, les rapports mères/filles, le rapport à la mode et à la normalité, le rapport à la beauté.
À propos d’injonctions faites aux femmes, votre second choix s’est porté sur trois podcasts concernant Gisèle Halimi, avocate et militante féministe disparue en 2020. Pourquoi cette figure en particulier ?
D’une certaine façon, l’histoire de Gisèle Halimi en fait un personnage fantastique à explorer. C’est quelqu’un d’exceptionnel avec une destinée et une force de caractère incroyables. Elle tient. Malgré tout, contre vents et marées : elle tient ! Comme figure de femme forte elle est assez « classique » mais, comme un écho à Carmen (que Rosemary Standley interprète dans le spectacle de François Gremaud présenté à MA scène nationale – ndlr) j’avais envie de montrer cet aspect-là.
Et puis j’avais aussi envie de parler de mon rapport au podcast qui est celui que j’entretiens avec la radio depuis l'enfance. Par exemple, là, j’aime comme ces trois podcasts représentent des formes de radio différentes, des époques différentes de France culture. Il y a d’abord les interviews de À voix nue, et ensuite le documentaire dans Les Grandes Traversées avec le contexte, les voix des amis, des avocats, des collègues qui l’ont côtoyée. Et puis, pour finir, le détour par une création où Gisèle Halimi permet à Estelle Meyer de parler d’autre chose et de parler d’elle-même en particulier. Elle en fait quelque chose de très personnel où elle évoque de nombreux sujets, dont un viol subi.
Pendant le confinement, certaines émissions ont pris plus de place dans mes écoutes. Les podcasts féministes en particulier, qui m’ont ouvert l’esprit sur la situation des femmes, et celle des hommes aussi d’ailleurs. Mais je trouvais que proposer ici des podcasts aussi connus que La Poudre ou Les Couilles sur la table, même s’ils sont très intéressants, c’était tout de même un peu cliché.
Au risque de devoir transgresser les règles de MA galerie sonore concernant le nombre de podcasts conseillés, vous avez aussi suggéré Christine Delphy qui est une personnalité beaucoup moins exposée des luttes féministes.
Effectivement. Christine Delphy, je la découvre un peu par hasard, justement parce qu’elle est citée par beaucoup de féministes. Pour moi, dans L’Ennemi intérieur, elle expose la base. Je précise que je l’ai écouté, pas lu parce que c’est quand même assez difficile, il faut se concentrer un peu ! Alors ça peut impressionner, des heures d’écoute, une langue plus universitaire, mais moi j’ai trouvé ça très intéressant.
C’est impossible à résumer rapidement, et il ne m’en reste que des bribes, mais j’ai aimé en particulier qu’elle parte de son enfance et du constat qu’elle fait, petite fille, de la vie de ses parents. Ils étaient tous les deux pharmaciens et avaient donc le même métier, mais le midi elle se demandait pourquoi son père mettait les pieds sous la table avec son journal alors que sa mère faisait à manger. Pour elle, ça a démarré comme ça, devant le constat d’une injustice.
Aujourd’hui j’ai une certitude, c’est qu’on peut toujours crier et revendiquer l’égalité, mais c’est au quotidien, à la maison, dans les tâches ménagères, dans la répartition de la charge mentale qu’elle doit exister. Je vois bien, chez nombre de mes copines, toutes féministes, toutes avec des compagnons très éclairés, eh bien même là ! ça n’est pas toujours acquis. Bien évidemment, l’égalité des droits, des salaires, sont des questions très importantes, mais tant qu’à la maison ça n’est pas en quelque sorte validé… c’est qu’il en reste à faire.
Par le prisme du foyer, de la famille, on peut arriver à votre dernier choix, à savoir un podcast pour les enfants (entre autres) de Pascal Parisot.
Pascal Parisot, je le suis depuis très longtemps. C'est quelqu'un qui m'amuse énormément, j'adore son humour, j'aime beaucoup ses chansons, ses jeux de mots… On en pense ce qu’on en veut, mais moi je suis à fond ! Probablement que les enfants ne comprennent pas toutes les subtilités, que ce soit pour La Vie de château ou Superchat, et qu’il y a une dimension qui est clairement pour les parents. Je n’ai pas beaucoup fréquenté les auteurs pour enfants, j’ai découvert Aldebert grâce à ma fille, il a de très beaux textes.
Enfin voilà, je suis très fan quoi. Et puis ça met un peu de gaité dans cette sélection.
Dans Pompon à Orsay, c’était particulièrement marrant de découvrir des œuvres que souvent, je connais très bien et de pouvoir se dire, allez, maintenant on va les voir en vrai ! Ça me permet de partager ma passion pour la peinture, ça offre une façon d’approcher cela, alors que ce n’est pas toujours évident avec les enfants. Il n’y a pas systématiquement cette dimension pédagogique et de transmission dans le travail de Parisot, mais là, il y a ça en plus !
Entretien réalisé par Adrien Chiquet avec Rosemary Standley
Avril 2025