VOETVOLK

NOVEMBRE
MA GALERIE SONORE

MA GALERIE SONORE est un espace virtuel dédié à l’art radiophonique lancé la saison dernière. Entre septembre et juin, des personnalités, réalisateurs et réalisatrices, artistes et radios complices proposent une sélection coup de cœur de trois œuvres audio ou émissions à l’écoute sur mascenenationale.eu et radioma.eu.

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voetvolk.be

Compagnie de danse contemporaine fondée par la danseuse et chorégraphe Lisbeth Gruwez et le compositeur et musicien Maarten Van Cauwenberghe. Le duo a réalisé une dizaine de pièces, dont plusieurs ont été présentées à MA. Cet automne nous ouvrons nos plateaux à WASCO!leur premier spectacle créé avec des enfants, tout public.

En 2007, Lisbeth Gruwez et Maarten Van Cauwenberghe fondent Voetvolk, leur compagnie de danse contemporaine et de performance. Leur travail est une recherche sur le mouvement tant corporel qu’auditif. Le 30 novembre, ils présenteront à MA scène nationale le spectacle « WASCO! » intégralement interprété par dix enfants.

Même s’il existe des précédents, il est plutôt rare de voir une compagnie dirigée à la fois par une chorégraphe et un musicien. Pouvez-vous nous raconter comment est née cette association ?
Lisbeth Gruwez : Eh bien, la danse ne va pas sans musique !
Maarten Van Cauwenberghe : A la fin des années 90, début des années 2000, on était tous les deux dans des spectacles d'autres metteurs en scène, en particulier de Jan Fabre. C'est là qu'on s’est rencontrés et qu’on a commencé à travailler ensemble. Quand Lisbeth a démarré sa propre compagnie de danse, j'ai suivi.
Lisbeth Gruwez : Comme toutes les compagnies sans beaucoup de moyens au début, on a démarré avec des soli. Dès le départ, on était ensemble en studio : lui créait la musique, puis on avançait ensemble. On improvisait à partir d’une musique déjà très élaborée. Nous travaillions avec beaucoup de sérieux, et ça a marché.

Vous avez choisi chacun personnellement un podcast, ainsi qu’un troisième lié à votre spectacle. Les deux premiers sont en anglais. Le podcast « Sound of sand » explore la microscopique place de l’humanité dans l’univers en abordant les choses par les prismes de la spiritualité et de la complexité. Vous avez choisi l’épisode #20 avec Laura Inserra.
L. Gruwez :  Oui, l’épisode s’appelle «Vibrating with Awe». Je ne sais pas trop comment traduire «awe», c’est un peu être émerveillé, en admiration. Par exemple, quand on regarde un arbre et qu’on peut littéralement tomber amoureux de sa beauté. Dans ce podcast, Laura Inserra, une thérapeute sonore, utilise des bols tibétains et d’autres instruments vibrants pour « guérir » des traumas ou des blocages. Elle explique que tout est en vibration, que tout est vivant. On peut trouver ça un peu new age, spirituel, mais pour moi, cette idée d’être en résonance avec les choses est très belle. Peut-être qu’on perd ça, cette capacité d’émerveillement, de voir la beauté des choses. Et Laura Inserra en parle d’une manière qui me touche vraiment. Je dois avouer que je déteste les podcasts en général ! Il y a souvent trop de sons et de publicités, mais dans celui-ci, rien de tout ça. Il y est question d’humanité, de retrouver l’émerveillement. A la fin du podcast tu reçois vraiment un bain de sons qui est très agréable et qui fait faire un vrai trip à l’auditeur. Ça, c'est cadeau ! Laura Inserra a une voix agréable et elle raconte son enfance, elle est sicilienne, où elle communiquait avec les fleurs, les arbres… elle ressentait déjà les vibrations autour d’elle. Je sais que Maarten ça lui fait des cheveux gris que je parle de ça, mais chez moi ça résonne. J’ai essayé dans notre spectacle « Nomadics », en marchant avec les gens, à la campagne, dans la nature, de les faire regarder les fleurs à nouveau, l'herbe qui bouge, qui fait des mouvements, la poésie de la nature en vibration.

Maarten vous avez choisi, quant à vous, « Stephen Frys 7 Deadly Sins », une série de podcasts qui nous entraîne dans une exploration philosophique, historique et culturelle des sept péchés capitaux du Moyen Âge à nos jours, montrant comment chaque péché s’inscrit profondément dans nos comportements modernes. Ce podcast nous pousse à réfléchir sur les zones d’ombre de l’âme humaine, tout en offrant un voyage intellectuel divertissant et finement argumenté.
M. Van Cauwenberghe : Je suis un peu comme Lisbeth, je n’écoute pas souvent de podcasts, mais Stephen Fry m’a vraiment aidé pendant la Covid, avec ses «7 Deadly Sins» qui sont sortis à ce moment-là. C’est avant tout pour cette raison que j’ai choisi ce podcast. On a un peu trop vite oublié la Covid, comme si rien ne s’était passé. C'est bizarre, parce que c’était il n’y a vraiment pas très longtemps. Cette période où on était à la maison, loin des gens, loin de la concurrence, loin du bruit. Et avec lui, Stephen Fry, c'était chouette. Il t’amène quelque part, il te donne aussi d'autres perspectives sur toi-même et c'était vraiment bien à ce moment-là d'avoir quelqu'un qui fait ça d’une manière intelligente, très drôle, et avec cette langue très riche. C’est très bien documenté et, même s’il te met un peu mal à l'aise avec tes péchés, tu ne te sens pas comme la pire personne au monde. Alors ça te donne quand même un peu de nourriture pour repenser ta propre vie et peut-être changer ou essayer de te changer un peu.
Dans notre carrière c'était quand même important ce moment de la Covid. Pendant deux ans Lisbeth et moi nous avons beaucoup parlé de changer, de l’après, et puis on a fait d'autres spectacles, « Nomadics » par exemple qui est vraiment sorti de cette expérience, tout comme « Into the Open », qu’on a déjà joué à Montbéliard. Quand j'en parle maintenant, je trouve que c’est quand même incroyable comme on n’a rien compris. On est de nouveau dans les logiques de concurrence, on est de nouveau, full force. J’aimerais que tous les deux ans, trois mois de pause ! Ce serait super !

Formellement, on peut voir un point commun entre ce podcast et le premier : l’absence de musique et d’ambiances sonores. Est-ce qui vous plaît, Maarten, dans les récits de Stephen Fry ?
Maarten Van Cauwenberghe : Maintenant que vous le dites, effectivement. Pour moi, et même dans les spectacles, c’est très difficile d’écouter deux choses en même temps. Soit j'écoute la musique, soit j'écoute les paroles, pas les deux. Il y a des podcasts avec trop d'éléments superflus qui me distraient. Typiquement, lorsqu’il y a trop de musique. Chez moi je ne mets pas beaucoup de musique non plus, je n’arrive pas à travailler avec de la musique.
Lisbeth Gruwez (désignant un mur plein de vinyles chez Maarten) :  Donc tous ces disques, tu ne les écoute jamais ?
Maarten Van Cauwenberghe : Si si, je les mets, mais pour les écouter vraiment.

Votre troisième choix est en lien avec « WASCO! », le spectacle que vous présentez à MA scène nationale le 30 novembre. Il s’agit d’un spectacle avec une dizaine d’enfants sur le plateau qui semblent livrés à eux-mêmes avec crayons, peintures, etc. Ils donnent l’impression d’être des purs produits d’une éducation toute permissive et pourtant, en proposant le podcast de Caroline Goldmann ici, vous semblez contredire cette impression. Vous pouvez nous en dire plus ?
Lisbeth Gruwez : Alors, « WASCO! » c'est la marque des crayons que les enfants utilisent sur scène, mais aussi un jeu de mots en mauvais anglais avec What’s going on ? A la façon dont le disent les enfants dans entre le début et la fin d’une ligne qu’ils dessinent : Wasco’ing on? On trouvait ça marrant. Dans le podcast, en effet, de Caroline Goldmann remet un peu en question cette tendance au « tout positif » dans le rapport aux enfants. Elle conteste que ce soit vraiment une bonne chose et elle questionne les conséquences lorsque l’enfant grandit et qu’il se rend compte que tout n'est pas si rose. Elle explique qu’à l’adolescence, ça peut devenir angoissant, mais pour leur dire la vérité et pour les traiter comme des êtres humains, et de les préparés à l’ordre et le chaos du monde, avec des limites claires. De nommer les choses telles quelles sont, de ne pas les embellir, les dire franchement, sans condescendance. Ça se situe entre pousser et ne pas pousser, mais quand même dire à l’enfant ce que sont les conséquences de ce qu’il fait, de ses choix, c’est être franc avec l'enfant. C'est une petite société de 10 enfants. On traite tout le monde de la même façon et on parle franchement avec eux. Finalement, ils font tout tous seuls sur scène et c'est génial parce que quand on donne des responsabilités à un enfant et qu’on lui explique pourquoi on lui donne des responsabilités, on voit qu'en fait ils sont capables de faire beaucoup plus que quand on les enferme dans une cage dorée.
Maarten Van Cauwenberghe : Nous, en tant qu’adultes, on est peut-être jaloux de cette liberté de franchir les limites. On est vraiment à cette frontière entre ce qui est « convenable » et ce que nous, adultes ou enfants, ne pouvons pas faire. Et c'est quelque chose d’intéressant aussi de voir comment on réagit à des enfants qui dépassent leurs limites. Cette réflexion est aussi dans le podcast.

Entretien réalisé par Adrien Chiquet avec Lisbeth Gruwez et Maarten Van Cauwenberghe
Novembre 2024

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